1790 : élection du premier Maire de Lille
Le 17/02/2020 à 12h31 par Archives municipales
Résumé

Il y a 230 ans, le 25 janvier 1790, à l’Hôtel de Ville de Lille, deux mondes se font face : d’un côté, les représentants de l’échevinage, l’administration municipale d’Ancien Régime, et de l’autre, les membres de la nouvelle municipalité qui viennent d’être élus par les représentants d’une partie des citoyens. Louis Vanhoenacker est élu Maire de Lille. Les Archives municipales vous proposent de revenir sur cette première élection.

Convocation des citoyens actifs de la ville de Lille pour les premières élections municipales.

Archives municipales de Lille – 17984

 

Au printemps 1789, les Lillois subissent la cherté de la vie et des problèmes de subsistance. Le ravitaillement en grains est difficile et la population craint la disette.

Un désir de réformes profondes s’exprime dans les cahiers de doléances rédigés à l’occasion de la convocation des Etats généraux le 5 mai 1789.

Après l’annonce de la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, les troubles se développent dans la ville. 

 

Le 21 juillet 1789, des émeutes éclatent prenant à partie les représentants du roi, certains membres du Magistrat et des négociants jugés accapareurs [1]

Pour faire face à ces troubles, des citoyens désignent, le 22 juillet 1789, un comité chargé d’organiser les milices bourgeoises. Les miliciens troquent leurs cocardes blanches pour la nouvelle cocarde tricolore et s’approprient les armes de l’arsenal. Une garde nationale est ainsi constituée.

 

De même, les 5 régiments en garnison à Lille prêtent serment d’obéir « à la Nation, au roi et à la Loi ».

 

L’organisation de la garde nationale de Lille in Derode, Histoire de Lille et de la Flandre Wallonne,

tome 3, gravure de Victor Adam

Archives municipales de Lille – BH432

 

Toutefois, la Grande Peur se répand dans les campagnes alentours et des émeutes se déclenchent en ville du fait des difficultés de ravitaillement. Des brochures entretiennent l’agressivité d’une population impatiente de voir disparaitre rapidement les droits seigneuriaux. 

 

Les inquiètudes du Magistrat lillois

 

Affaiblis dans leurs capacités d’actions et de plus en plus assaillis par les Lillois, les membres du Magistrat demandent à l’intendant à ne pas être renouvelés. Leur lettre dresse le portrait de la ville à cette période :

 

« Nous nous empressons de vous prévenir que l’anarchie qui règne en cette ville et l’effervescence qui en est la suite nous font craindre à tous moment qu’on attente à nos jours et à nos fortunes. Plusieurs de nos collègues ont été les victimes de la fureur du peuple et nous sommes menacés d’éprouver le même sort. L’autorité que le Roi nous a confiée est non seulement méconnue mais annulée : tout acte de l’administration légale et patriotique devient contre nous un motif de ressentiment et de vengeance ; nous avons, nous osons le dire (sans le plus léger reproche) perdu la confiance du public animé d’un esprit de novation, et la perte de cette confiance, sans laquelle il n’est ni considération ni sécurité, nous expose à tous les attentats. Nous vous supplions, Monseigneur, d’avoir égard à la position malheureuse dans laquelle nous gémissons et de vouloir bien vous occuper de notre remplacement. L’abandon de nos fonctions eut été de notre part une lâcheté, avant que nous fussions relevés du serment que nous avons prêté, mais leur continuation dans ces moments de troubles serait une témérité dangereuse. Tout administrateur suspecté, même sans cause, n’a plus d’autre parti à prendre qu’à solliciter son prompt remplacement […]».

 

Lettre du Magistrat à l’intendant (septembre 1789)

Archives municipales de Lille – 15443

 

Comme le souligne l’historien Jean-Pierre Hirsch, « Le pouvoir local allait revenir à ceux qui se montreraient les plus aptes à rétablir l’ordre; assurer l’approvisionnement et organiser les milices » [2]. De fait, le Magistrat, que l’intendant refuse de remplacer immédiatement, partage temporairement le pouvoir avec la bourgeoisie libérale qui contrôle la Garde nationale.

Les membres de la bourgeoisie s’étaient déjà faits remarquer lors de la rédaction des cahiers de doléance du Tiers Etat de la ville de Lille, par leur détermination à changer une structure municipale datant de la fin du XIIe siècle.

 

Le 14 décembre 1789, l’Assemblée nationale constituante fait paraître le décret créant les municipalités et organise les premières élections municipales qui ont lieu le 25 janvier 1790.

 

L'organisation de la première élection en janvier 1790

 

La commune ainsi créée est administrée par un conseil général, vite appelé conseil municipal. Il est élu pour deux ans et renouvelable par moitié tous les ans.

 

Le système électoral choisi est censitaire (les électeurs doivent s’acquitter d’une taxe) et indirect (les électeurs élisent d’autres électeurs qui vont, eux, élire la municipalité. A Lille, les citoyens actifs [3] choisissent 5461 électeurs. Ces électeurs élisent les 17 officiers municipaux et 36 notables constituant la nouvelle municipalité. Parallèlement, les électeurs élisent un maire pour deux ans qui est rééligible.

Fiche de dépouillement des bulletins de vote d’un district de Lille

Archives municipales de Lille – 17984

 

Le 25 janvier 1790, à l’Hôtel de Ville, deux mondes se font face :

D’un côté, les représentants de la municipalité d’Ancien Régime encore en poste (Prévôt, Rewart, Mayeur, échevins, conseillers et Huit-hommes) qui, après avoir constaté le résultat du scrutin, reconnaissent le nouveau maire Louis Vanhoenacker [4].

De l’autre, la nouvelle municipalité, les bourgeois négociants de Lille qui évincent les anciens tenants du pouvoir municipal.

 

 

Procès-verbal d’élection du Maire, 25 janvier 1790

Archives municipales de Lille – 18069

 

 

« Procès-verbaux d’élections des membres de la Municipalité de la ville de Lille, en exécution des Lettres-patentes du Roi, sur le décret de l’assemblée nationale du 14 décembre 1789.

Maire

L’an 1790, le 25 janvier, nous Prévôt, Rewart, Mayeur, Echevin, Conseil et Huit hommes de la ville de Lille, étant assemblés en l’hôtel commun de ladite ville, avons […] procédé successivement à l’ouverture et au recensement général des scrutins des quinze districts de cette dite ville et après en avoir fait le dépouillement, nous avons reconnu que le nombre de tous les citoyens actifs qui ont voté dans les assemblées particulières pour l’élection du Maire était de 1783 et que Monsieur Louis Vanhoenacker, négociant en cette ville a réuni la pluralité absolue des voix pour être élu Maire. Ce fait, est comparu Monsieur Louis Vanhoenacker lequel a déclaré que pour répondre à la confiance dont ses concitoyens l’avaient honoré, il acceptait la place de Maire à laquelle il avait été nommé et a signé avec nous […].

 

Portrait de Louis Vanhoenacker – Archives municipales de Lille - 1D4

 

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