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1708 : l'importance du maintien de la religion catholique à l'issue du passage de Lille sous gouvernance hollandaise

Lors de la guerre de succession d’Espagne, la ville de Lille est assiégée. Elle capitule le 23 octobre 1708 et est occupée par les Provinces Unies (actuels Pays-Bas). Les discussions entre les plénipotentiaires lillois et hollandais portent notamment sur la place de la religion réformée dans la ville nouvellement conquise. Un point sensible qui transparaît dans le document même de la capitulation.  

Capitulation de la Ville de Lille en date du 25 octobre 1708. Archives municipales de Lille. AG/310/3

Le siège de la ville du 13 au 23 octobre 1708

A l’été 1708, Lille se trouve au cœur de la guerre de succession d’Espagne (1701 à 1714). Ce conflit à l’échelle européenne oppose Louis XIV aux Habsbourg d’Autriche qui se disputent la succession du trône d’Espagne.

Avant son décès en 1700, le roi d’Espagne, Charles II d’Autriche, avait désigné comme successeur le duc d’Anjou, petit-fils de Louis XIV et arrière-petit-fils de Philippe IV d’Espagne. Cependant, les Habsbourg d’Autriche à la tête du Saint Empire romain germanique (les Impériaux) estiment que la couronne leur revient de droit car le roi Charles II est le dernier représentant de la branche espagnole des Habsbourg.

Pour empêcher la constitution d’un vaste ensemble territorial, qui menaçait l’équilibre des forces en Europe à l’avantage de la dynastie Bourbon, se forme une Grande Alliance réunissant l’Autriche, les Provinces Unies, l’Angleterre et le Saint Empire romain germanique.

Après plusieurs années de guerre en Europe, l’issue du conflit est encore incertaine. Pour la campagne de 1708, l’armée française lance une offensive vers les Pays-Bas. La défaite des troupes françaises à Audenarde en juillet ouvre la route de Paris aux troupes coalisées du duc de Marlborough et du prince Eugène de Savoie. Ce dernier décide d’assiéger Lille.

Le maréchal de Boufflers dirige la défense de la Ville et de la Citadelle. Le système de fortification conçu par Vauban empêche l’investissement rapide de la place. La Ville se rend le 23 octobre alors que la citadelle résiste jusqu’au 9 décembre. La fin du siège en plein hiver empêche les coalisés de pousser leur avantage jusqu’à Paris.

Plan de Lille assiégée de 1708. Archives municipales de Lille. AG/1394/2

 La capitulation est celle que le Magistrat, qui rassemble les représentants de la Ville, a présentée le 23 octobre 1708 aux commandants de l’armée coalisée. Elle est un acte politique qui liste les conditions de la soumission de la Ville à sa nouvelle tutelle.

Quant à la capitulation de la citadelle du 9 décembre, elle ne concerne que les troupes de la citadelle. C’est un acte militaire qui définit les modalités de la fin des combats.

La capitulation politique et l'importance de la question religieuse

 La capitulation de 1708 définit les droits et devoirs de la Ville vis-à-vis de son autorité de tutelle, en l’occurrence les Etat généraux des Provinces-Unies à La Haye. Traditionnellement, les autorités municipales s’assurent du maintien des privilèges et coutumes de la Ville. Cette capitulation est particulière car le Magistrat veut maintenir le culte catholique dans sa position hégémonique face à un nouveau souverain de religion protestante.

Tout au long de la période moderne, comme le souligne l'historien Alain Lottin, Lille est une "citadelle de la Contre-réforme". Il n’est pas anodin que le Magistrat mette en avant les clauses relatives au statut de la religion catholique avant même la défense des privilèges de la Ville.

Le premier article proposé par les échevins est le maintien du culte catholique. Si cela est accordé à la Ville, les Hollandais exigent néanmoins que des locaux soient réservés pour les étrangers de confession différente.

Article premier de la capitulation avec en marge la mention "Accordé moyennant que quand il y aura une garnison de différentes religions, on montrera des lieux propres pour y faire les exercices de religion" . Archives municipales de Lille. AG/310/3

Les articles suivants précisent les conditions du maintien du culte catholique : application du Concile de Trente, garantie des privilèges des institutions religieuses séculaires et régulières. L’autorité centrale accorde sans grande contrepartie ces demandes du Magistrat. D’ailleurs, le plénipotentiaire des Provinces Unies valide une grande majorité des clauses avec la mention « accordé sur le pied que cela a esté avant l’année 1667 ». Cette formule est utilisée pour montrer aux Lillois que la prise de leur Ville n’est que le retour à la vie d’avant 1667, avant le rattachement à la France, jouant sur un possible sentiment anti-français des Lillois. 

Deuxième article de la capitulation avec en marge la mention « accordé sur le pied que cela a esté avant l’année 1667 ». Archives municipales de Lille. AG/310/3

Les conditions de la capitulation sont accordées par plusieurs responsables dont les intérêts et opinion religieuses divergent : anglais et hollandais sont protestants alors que les impériaux sont catholiques. Il est probable que les clauses favorables à la religion catholique sont défendues par Eugène de Savoie, étant lui-même de cette confession.

Cependant, ce sont les Provinces Unies qui auront la charge de gouverner la châtellenie de Lille et y favoriseront le prosélytisme calviniste malgré l’article premier de la capitulation :

« sans qu’aucune aultre [religion] puisse y estre exercée publiquement ».

Auparavant défiant vis-à-vis des français, les tensions religieuses amènent les Lillois à mieux considérer leur appartenance au Royaume de France. Ils fêteront avec ferveur leur retour dans le giron français, en 1713.

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